📙 Excerpt from Revue des Deux Mondes, 1849, Vol. 3M. Levrault sentait bien que les honneurs et les dignités ne vien draient pas le trouver dans son entre-sol de la rue des Bou rdonnais. Il avait déjà tourné le dos à tous ses amis; il attendait que sa fille fût sor tie de pension pour commencer une vie nouvelle. Ne sachant guère de quel côté aborder le monde des grandeurs, objet de sa convoitise, il comptait sur les inspirations de Mlle Laure Levrault, qui répondit di gnement à ses espérances.Me Laure Levrault avait été élevée dans un des pensionnats les plus aristocratiques de Paris. Peut - être eût - elle été charmante, si elle se fût épanouie simplement dans la modestie de sa condition. Transplantée dans un parterre de comtesses en herbe et de marquises en bouton, elle avait perdu de bonne heure son parfum et sa grace native; comme un moineau franc dans une volière de bengalis, elle avait appris avant toutes choses à souffrir de son origine. Les plaisanteries, les fines allu sions que ses jeunes compagnes ne lui ménageaient guère, avaient achevé d'irriter sa souffrance. Les jeunes filles sont impitoyables entre elles; ce sont déjà des femmes. Au lieu de rendre la monnaie de leur pièce à ces petites pécores qui se faisaient un jeu de l'humilier, elle avait pris en haine sourde et profonde la boutique où elle était née, la rue des Bourdonnais tout entière, et jusqu'à ce nom de Levrault qui l'exaspérait. Quand ce nom maudit, quand ce nom funeste, presque toujours...